
Bon, voilà une chronique un peu plus longue que d’habitude, mais c’est normal, elle porte sur LE film de merde de l’année :
300 du tâcheron Snyder, adaptation du gros con Miller. Avec des cadors pareils, on était presque sûr d’avoir de la bonne, de la gluante, de la bien refoulante, bref, en un mot comme en cent, de la bouse de compétition !
Si le trailer, qui a rencontré un succès incroyable sur internet pendant quelques mois, était efficace, il laissait poindre un parti pris radical : celui du tout numérique. Ce parti pris graphique semblait intéressant et regroupait tous les espoirs de millions d’amateurs de films qui bastonnent.
Hélas, trois fois hélas. Ce film touche les abysses de la nullité, et ce, à tous niveaux !
On a pu d’abord craindre que politiquement le film fut un peu ambigu, voir carrément réac… Miller étant connu pour tenir des positions d’une grande finesse, n’hésitant pas à nous faire part de ses brillantes analyses, comme par exemple lors de cette interview à la radio américaine NPR :
NPR: Hum, et quand vous dites que nous ne savons pas ce que voulons, quelle en est selon vous la raison?
FM: Bon, je pense qu'en partie c'est lié à la façon dont nous sommes instruits. On nous dit constamment que toutes les cultures sont égales, et que tout système de croyance est aussi valable qu'un autre. Et en général l'Amérique est connue pour ses défauts plutôt que pour ses qualités. Quand vous pensez à ce que les Américains ont accompli, en construisant ces villes incroyables, et à tout le bien qu'ils ont apporté au monde, c'est plutôt un crève-cœur de voir autant de haine contre l'Amérique, pas seulement à l'étranger, mais même chez nous.
NPR: Nombre de personnes vous diraient que c'est ce que l'Amérique a fait à l'étranger qui a provoqué ces doutes et même la haine de ses propres citoyens.
FM: Bien, OK, alors finalement parlons des ennemis. Pour une raison quelconque, personne ne semble parler de ce que nous combattons, ni de la barbarie du sixième siècle qu'ils représentent. Ces gens décapitent la tête des gens avec des scies. Ils asservissent les femmes, ils mutilent le sexe de leurs filles, ils ne se comportent selon aucune des normes culturelles auxquelles nous tenons. Je parle dans un micro qui n'aurait jamais pu être un produit de leur culture, et je vis dans une ville dont trois mille de mes voisins ont été tués par des voleurs d'avions qu'ils n'auraient jamais pu construire.Et ce ne sont pas les déclarations de Snyder à Mad Movies (n°193) qui pourraient nous rassurer :
Zack Snyder : (...) Lorsque je travaille sur ces comics, j’estime qu’il n’est pas de mon ressort de commenter leurs orientations politiques. Beaucoup de réalisateurs pensent le crontraire, et considèrent qu’une partie de leur tâche consiste à donner un point de vue politique dans leur adaptation. Mais ce n’est pas mon cas (…) je dois restituer les intentions de leurs auteurs, c’est ma responsabilité (…) pour moi il était essentiel de respecter à la lettre l'esprit de la bande dessinée. Frank n'a absolument aucun problème pour donner ses opinions politiques. Que ça plaise ou non, il n'en a rien à foutre !
Mad Movies : Il travaille toujours sur Batman versus Ben Laden ?
Zack Snyder : Oui, il est super hardcore ! Les choses semblent claires, mais si il revendique ce coup ci une honnêteté dans le traitement du matériau de base, Snyder fidèle soutien de la NRA, oublie de nous expliquer pourquoi il a trahis Romero dans l’adaptation criminelle de
Zombie, transformant l’un des plus grand brûlot contestataire des années 70 en daube fadasse… Comment transformer un vieux calendos qui refoule en portion de vache qui rit ! Snyder, l’homme qui a inventé la pierre philosophale qui transforme l’or en merde !
Dans cet état d’esprit plutôt soupçonneux, on découvre en Janvier dernier une preview dans Mad Movies dans lequel on peut trouver l’édifiante interview de Snyder. Cédric Délelée n’y va pas par quatre chemins : «
on entend déjà la presse bobo s’élever contre le point de vue du métrage en le taxant de facho (Sparte) et d’homophobe (les Perses ne sont pas très virils et Leonidas ne se gêne pas pour le faire remarquer) mais qu’importe : oui, 300 est un film d’hommes. Pas des Dieux, juste des hommes. Qui luttèrent jusqu’à leur dernier souffle et répandirent leur sang sur la terre de leurs ancêtres pour sauver leur famille et la liberté de leur peuple, préférant mourir debout l’épée au poing plutôt que de vire une existence à genoux. » Passons sur le style, assez grotesque, pour noter que si on tique sur les aspects réac ou homophobe on se retrouve dans la catégorie « bobo », genre p’tites pédales ne comprenant rien aux vrais films d’action. Donc voilà, pas grave si c’est réac, faf et homophobe, c’est parce que c’est un film d’ « hommes », pas un film de femmelettes, pas un film de pédés, un vrai film qui parle à tes couilles et, pas de soucis, pas à ton cerveau. Laisse donc chouiner tes potes intellectuels, qu’ils aillent se branler plus loin ! C’était donc bien parti, mes couilles et moi, on était prêt à se manger ce monument de furie réactionnaire, ce monstre de violence dantesque et de barbarie patriote !
Ben en fait, après visionnage, je me suis rendu compte qu’il fallait pas en faire un gros flan de ce « truc »… Snyder est tellement mauvais que même si je craignais un film bien réac, le résultat est pas franchement grave, et même si il y a des allusions un peu puantes tout au long du film, ça n’est absolument pas gênant vu la bêtise crasse du film.
D’abord visuellement, le film est d’un kitsch absolu… Le film avance comme une succession de tableaux, moches la plupart du temps, parfois réussis, mais le plus souvent d’un pompier à mourir de rire ! La scène des Oracles renvoie directement à un remake d’une pub Carte Noire, volute de fumée et éclairage compris. Les scènes récurrentes (répétitives plutôt mais ne commençons pas à être méchant) dans les champs de blé m’ont fait penser à une excellente synthèse de ce que nous avaient offert les créatifs d’Ovomaltine et de Kelloggs…
L’essentiel du film étant composé de bastons, vendues comme homériques et inédites, on se dit au diable l’emballage, ruons nous donc sur le contenu ! Alors, ben ici aussi c’est la Bérézina ! Elles ont beau être parfois joliment chorégraphiées, elles restent souvent plates et peu efficaces, et c’est souvent dû à leur répétition et la systématisation d’un « bullet time » des plus incongru… Par cette hyper chorégraphie numérique, la violence reste totalement abstraite, on a affaire à de la danse, pas à de la baston, un ballet de silhouettes sans consistance. En prime on a un sang digital qui s’efface en suspension et qui n’a aucune texture, aucune existence, une hémoglobine au bon goût de pixels… De plus on assiste à une sorte de syndrome « Seigneur des Anneaux » : En plan large, on nous montre des milliers et des milliers de soldats mais en plan resserré ils ne sont plus qu’une quinzaine, clairsemés. Des 300 Spartiates, on en verra une douzaine… Ils massacrent à tour de bras, mais par terre, pas de trace de sang et très peu de cadavres… Le sol est aussi clean et plat que celui d’un gymnase, on n’arrive pas à imaginer autre chose que le studio dans lequel le film a été tourné. Ca fait penser à ces jeux FPS, où les cadavres disparaissent au fur et à mesure.
Le film a beau être « décollé » de la réalité, ce manque de crédibilité nuit totalement à la cohérence du film. Lorsqu’il cite, en pure perte,
Excalibur, avec la scène de l’empalement, on ne peut s’empêcher de se souvenir que le parti pris « irréaliste » de Boorman faisait naître la poésie et le mystère, là c’est juste nul. Il a beau citer
Conan (« quelques hommes contre de nombreux », la bravoure de l’Homme contre les Dieux) à aucun moment on ne se sent impliqué comme on peut l’être lorsque Conan et Subotai affrontent les troupes de Thulsa Doom… Snyder peut jouer la surenchère, il n’arrive pas à la cheville du mètre étalon de Milius, toujours invaincu depuis 25 ans.
Ici, la succession des faits d’arme intervient sans qu’on y comprenne grand chose… La mise en scène, les décors incohérents et l’écriture des scènes en roue libre rend tout ça très très confus pour finalement aboutir à un final d’un grotesque achevé. C’est le règne de la frime instantanée, comme par exemples ces plans faits pour figurer dans les bandes annonces ou les photos d’exploitation et qui ne sont là que pour appâter le gogo. Je pense par exemple à la scène des éléphants (deux plans) ou à celle du rhinocéros géant (un plan)… De l’esbroufe.
Alors même si je trouve que les scènes de fight sont globalement totalement loupées, le reste me ferait penser que Snyder aurait du se focaliser uniquement là dessus ! Les passages à Sparte sont peut être expédiés à une vitesse folle, Snyder trouve quand même le temps d’accumuler les clichés les plus ridicules… La scène de la Reine devant le conseil est digne des pires Nanars italiens des années 80. Les scènes dans les champs de blé sont à se pisser dessus tellement on a l’impression d’être pris pour des cons (mais si trop bonne idée ! La liberté symbolisée par le vent dans les champs de blé ah ah ah ! Bête à manger du foin, ça m’a fait penser au
Cercle des Poètes Disparus uh uh uh)… Les scènes du Roi Perse pourraient renvoyer à celles d’Hérode dans la
Passion Du Christ (déjà bien tartes) mais arrivent à peine à la hauteur de
2 heures moins le quart avant Jésus Christ et on se met à regretter que le rôle de Xerxès n’ait pas été confié à Michel Serault ! Xerxès, le seul truc qu’ils ont trouvé, c’est de lui donner la voix de Darth Vader pour faire style, un peu comme le souffle d’androïde des Immortels (ouuuuh c’est inquiétant tout ça… ouuuuuh qu’est ce qu’ils ont l’air méchants !)
La psychologie des personnages atteint un tel niveau que j'ai l'impression que les bad guys de
Mad Max 2 ressemblent à des personnages de chez Kubrick !
En conclusion, ce film a un souffle épique d’asthmatique cancéreux, il a des punch lines en carton ondulé… Ca n’a aucun goût, c’est plat, c’est nul. Du cinéma de fast food qu’on n'a même pas à digérer vu que c’est déjà de la merde !